J’avais 11 ans en Mai 68, autrement dit, l’âge de profiter - sans rien trop comprendre à ce qu’il se passait - des journées sans classe.

La petite fille d’un pêcheur sicilien s’était liée d’amitié avec Dominique, la Corse, la Méditerranée en commun. On avait des surnoms dont je ne me souviens plus, comme si nous étions de dangereuses personnes.

Nous partions tous les matins pour le collège Paul Riquet, à Béziers, comme si c’était normal d’y aller alors que rien ne s’y passait.

L’ennui venant de ni comprendre rien, nous décidâmes de faire du stop pour flâner à Sète, voir cette ville emplie de mer, sentir comme une odeur de marée dans les filets des pêcheurs où du poisson se cramait, séchait ou pourrissait au soleil.

Jeunes et déjà esthètes ? Nous marchions sur la route jusqu’à ce qu’un gros camion passe ; là, on levait le pouce et beaucoup nous embarquaient. Pourquoi un camion ? Juste pour le plaisir de voir, comme jamais nous ne pouvions le faire, arriver l’horizon bleu, avec une vue « d’en haut » imprenable.

Je ne sais plus si c’était pendant ces événements-là, de Mai 68, que deux Biterroises montrèrent leurs culs aux CRS ; je me souviens par contre qu’une prof de Français nous a expliqué ce qu’il se passait, dont elle disait que c’était insupportable : la garde à vue des deux filles, puis les raisons de la colère, pourquoi elle faisait grève…

Sans le savoir, elle venait de planter quelques graines, qui en grandissant m’ont poussé à mon tour à regarder le monde et vouloir le changer.

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