Dans un article du 23 septembre Midi Libre s’alarme avec raison au sujet de la mort de l’étang de Capestang. Au même moment, dans un livre publié le 19 septembre, Nathanaël Wallenhorst présente une synthèse mondiale alarmante des points de rupture qui remettent en cause la viabilité de nos sociétés.
L’étang de Capestang est une vaste zone humide d’une superficie de 800 hectares, incluse dans un site humide classé Natura 2000 de 1374 hectares.
À l’origine, il y a plus de 2000 ans, l’étang de Capestang était un fjord marin. Avec le temps, le cordon littoral et l’ensablement de la côte l’ont séparé de la mer.
De cet ancien fjord marin il est resté une sorte d’étang résiduel, celui que nous connaissons actuellement, situé entre Capestang au nord et la plaine alluviale de l’Aude au sud.
En temps normal, cet étang est essentiellement alimenté par les crues de l’Aude et par une série de petits cours d’eau venus de l’intérieur des terres. Il a de tout temps été une réserve de chasse et de pêche et dernièrement une réserve naturelle.
Depuis 5 / 10 ans, l’équilibre fragile qui concourt à sa survie est cassé par le réchauffement climatique et la sècheresse endémique à tel point que les apports d’eau qui l’alimentent sont quasiment inexistants.
La sentence de ce changement climatique est sévère. À la fin de l’été 2022, 3000 à 4000 oiseaux (dont des espèces protégées) meurent du botulisme (une bactérie qui se développe dans les eaux chaudes stagnantes).
Cet été 400 oiseaux de plus sont morts de la même maladie. Un an auparavant de nombreux poissons sont morts.
Cet été aussi, il a été procédé à une opération de sauvetage de 600 kg de poissons en danger vital.
La raison de cette extinction massive est simple. Alors qu’un assec tous les 5 ans serait difficilement tolérable pour la faune et la flore, cet assec existe de manière continue depuis 5 ans.
Pour pallier cette catastrophe, l’ASA (association syndicale autorisée) qui gère l’étang réclame un apport d’eau estival depuis le canal du Midi voisin. Mais VNF qui gère le Canal jongle déjà très difficilement avec ses missions de navigation et d’irrigation (voir article sur le canal du Midi sur ce site).
Coincé entre sècheresse et réchauffement climatique l’étang de Capestang illustre localement la thèse globale de Nathanaël Wallenhorst sur les points de rupture qui remettent en cause la viabilité de nos sociétés.
Il souligne à quel point nous sous-estimons le danger que représentent les points de bascule.
Pour lui, la mère de toutes les menaces, c’est la question de l’eau. Beaucoup de points de bascule menacent le cycle de l’eau. Or l’eau irrigue tous les fondements de nos sociétés. L’agriculture, l’hygiène, l’économie : les pénuries d’eau à venir peuvent gripper toute la machine. Les conséquences des pénuries d’eau sont immédiates avec la faim, la peur, l’accaparement, les déstabilisations politiques et géopolitiques, les risques de guerre.
Si l’on regarde le tableau général : la perturbation du cycle de l’eau, la désoxygénation des océans, la fragilisation de la pompe océanique du carbone et du plancton, la fonte du pergélisol, les menaces sur les forêts et sur l’Amazonie, la fonte des glaciers. . .
On voit se dessiner une dynamique très forte qui va du local dans l’étang de Capestang au global à l’échelle de la planète
C’est sur ces deux axes qu’il faut agir et se mobiliser.