Si nous restons sur notre région l’Occitanie et notre département l’Hérault deux chiffres rendent compte de l’ampleur de la déroute du RN au deuxième tour des dernières élections régionales et départementales. Au niveau régional l’ex FN avait enregistré 826 023 suffrages en 2015. Le RN en recueille 366 467 en 2021. Au niveau départemental l’ex FN avait enregistré 140 353 suffrages en 2015. Le RN en recueille 74 980 en 2021. Le RN perd donc 459 556 suffrages en Occitanie et 65 373 dans l’Hérault. Il est temps de comprendre les causes d’une telle déroute.

Comme tous les partis d’origine fasciste le RN porte en lui une contradiction originelle : le culte du chef. Poussé jusqu’à la caricature le mythe du chef qui sait tout, qui voit, qui devine, qui entraîne, qui gagne, a ses limites intrinsèques : les résultats. Quand les résultats sont là le mythe peut être authentifié, quand ils ne sont pas là la porte est ouverte aux dissensions internes.

Dans la séquence politique qui a précédé ces dernières élections, des dissensions publiques sont apparues dans l’extrême-droite. Des militaires ont ouvertement appelé à un coup d’État. Dans notre région des groupes paramilitaires ont envahi une assemblée plénière, organisé le blocage de la frontière France / Espagne. Le tout pendant que le RN tentait péniblement de continuer à ‘’dédiaboliser’’.

Ces dissensions sont alimentées par ceux qui constituent tout à la foi un haut-parleur et un cheval de Troie, les chroniqueurs des chaînes d’info style CNEWS comme le plus célèbre d’entre eux, Éric Zemmour. En prime time tous les jours entre 700 000 et 1 million de personnes écoutent les rodomontades et les critiques des chevaliers blancs de l’extrême-droite qui tentent de laver plus blanc que blanc. Ce public captif suscite des convoitises. Mercantiles bien sûr pour Bolloré, le propriétaire de la chaîne, mais aussi politiques pour tous ceux qui se rêvent vizir à la place du vizir.

Capter, organiser cet électorat putatif est devenu un enjeu à l’extrême droite. Les tentatives de débordement à l’extrême-droite de Marine le Pen en sont la résultante. Non content d’avoir été ouverte avant les élections régionales et départementales, cette séquence va se poursuivre après.

On pourrait dire avec humour que la guerre des Gaules est déclarée.

Ces Gaules s’affrontent pour le leadership de l’extrême-droite. Marine Le Pen ne s’y est pas trompée quand elle demande à Éric Zemmour de choisir entre être chroniqueur et être candidat aux présidentielles. Le piège est loin d’être totalement refermé sur le RN mais il a déjà produit un mini syndrome fin de mandat de Trump. Rappelez-vous, les supporteurs chauffés à blanc par les chroniqueurs des chaînes d’informations américaines « pro Trump » avaient appelé au rassemblement du capitole à Washington dont on connaît l’issue. Trump s’était alors retrouvé sommé de choisir entre soutenir la rébellion ou la condamner.

Bien sûr Marine Le Pen n’est qu’aux portes du pouvoir et elle ne l’exerce pas. Mais elle se retrouve confrontée au même problème : commenter sur sa droite des initiatives qu’elle ne contrôle pas. Bien entendu Marine Le Pen n’a aucune complaisance à attendre d’un Éric Zemmour qui roule pour son propre taux d’audience et son propre avenir politique.

Dans cette cacophonie naissante, le maire de Béziers joue sa partition. Une partition en ré mineur par rapport aux têtes d’affiches, mais une partition quand même. Dans une sorte de copié / collé zemmouresque il distribue lui aussi les bons et les mauvais points au RN. Ce faisant il participe lui aussi à cette déroute électorale du RN. Nous en avons la preuve dans la ville de Béziers où le même jour au même endroit ses électeurs franchisés RN ont recueilli plus de suffrages aux départementales que le candidat RN aux régionales (voir article correspondant dans la rubrique en bref).

Dans ce bal des faux culs Robert Ménard se dit ami avec tout le monde : Éric Zemmour, Jean-Paul Garraud, Louis Aliot et bien sûr Marine Le Pen. Cet ami qui ne veut pas forcément du bien est partisan d’un état ultra libéral d’un point de vue économique, doublé d’une très forte connotation sécuritaire. Une sorte de remake des gouvernements polonais et hongrois.

Ce projet il le dit haut et fort est alternatif au programme qu’il juge trop social du RN. Comme le projet d’Éric Zemmour est alternatif au programme du RN qu’il trouve trop gaullien.

On peut faire confiance aux commentateurs, chroniqueurs et autres putschistes et activistes, la guerre des Gaules est déclarée dans l’extrême droite et elle va durer jusqu’aux présidentielles. Rien ne sera épargné à Marine Le Pen qui aura à lutter contre sa nièce, son père, ses opposants internes et externes, la droite la gauche et le centre. On peut s’en féliciter mais on ne peut pas s’en contenter.

Dans ce contexte la responsabilité des antifascistes est de continuer à dénoncer inlassablement la supercherie des aspirants caudillo et de la maison mère. De dénoncer les projets des uns et des autres. Et bien sûr politiquement de construire un programme alternatif.

Le RN et ses satellites concurrents ne s’effondreront pas seuls !

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