Il ne sera pas question ici de mon soutien ou non aux vignerons et viticulteurs qui ont manifesté le 15 novembre à Béziers, grands pourfendeurs (dans leurs discours) des normes et des écologistes, accapareurs d’eau et utilisateurs effrénés de pesticides. Nous n’avons pas la même vision de ce que devrait être l’agriculture, et l’absence totale de drapeaux de la Confédération Paysanne hier au rassemblement biterrois montre que je ne suis pas la seule à partager cette opinion. A chacun le droit de cultiver comme il l’entend et de boire ce qu’il veut, du moment que ça n’impacte pas la santé des riverains des vignes et que ça n’assèche pas les sols au profit de quelques-uns.
Je bois du vin (de préférence bio ou nature) et j’aime ça. Robert Ménard, lui, n’en boit pas, mais soutient les viticulteurs. C’est son droit. C’est aussi la raison de ma colère.

Des manifestations à Béziers, j’en ai fait beaucoup, pour diverses causes, des qui déplaisent à M Ménard (contre l’extrême-droite..), des syndicales, des plutôt militantes, contre les violences faites aux femmes par exemple. Jamais je n’avais vu un dispositif policier pareil : centre-ville barricadé, accès restreint aux voitures et aux bus, place de Gaulle interdite même aux piétons (pour j’imagine protéger la sous-préfecture), CRS, gendarmes, camions anti-émeutes (la 1ère fois que j’en voyais, et 2 d’un coup !), plus une seule voiture stationnée sur les Allées Paul Riquet. Visiblement, la préfecture s’attendait à des débordements et, tout en ayant autorisé la manifestation, avait pris des précautions. Mais débordements il n’y a pas eu, comme il n’y en avait pourtant pas eu à Montpellier, quand les mêmes camions anti-émeutes ou leurs semblables ont été utilisés contre les manifestants. Pas les mêmes manifestants. Les viticulteurs, eux, étaient pour M Ménard de bons manifestants : affiches municipales (payées par nos impôts, on aurait peut-être même pu acheter du vin avec ce qu’elles ont coûté) dans toutes les rues de Béziers, appelant à soutenir la manifestation, estrade municipale juste devant le théâtre, montée et démontée par les agents de la ville, et Ménard en tête de cortège. Rassemblement autorisé, entre 4000 (selon la police) et 7000 (selon les manifestants), BFM en ayant annoncé 10000 (propagande ou mauvais journalisme ?) devant le théâtre, pétards assourdissants (dont notre photographe a reçu une étincelle sur le visage) et pas un policier municipal en vue.

Je ne conteste évidemment pas l’autorisation de manifester et de se rassembler sur les Allées Paul Riquet, devant les chalets de Noël, avec sono géante et pétards explosifs. C’est un droit et heureusement. Une partie de la profession viticole est en crise, souffre, et veut légitimement le faire savoir. Mais je voudrais comprendre pourquoi (même si j’en ai une petite idée), quand une autorisation est demandée pour un rassemblement d’une cinquantaine de personnes sur le parvis du théâtre de Béziers pour la Palestine ou contre les violences faites aux femmes, la sous-préfecture nous demande d’aller ailleurs, ou interdit carrément le rassemblement : « Vous comprenez, les chalets de Noël, vous allez faire de la musique, M Ménard ne veut pas de nuisances sonores », comme le 25 novembre il y a 2 ans ? Pourquoi quand nous manifestons pacifiquement nous sommes entouré.es de policiers municipaux ? Pourquoi un cordon de nationaux empêche des personnes d’aller planter un olivier sur un terrain en friche (mais où il est prévu d’être construit un Centre de Rétention Administrative) ? Pourquoi des camarades se font contrôler pour quelques autocollants sur des feux rouges ? Et pourquoi nous avons droit à des interpellations musclées, des garde à vue, de la prison pour rien (manifestation du 30 janvier 2021, manifestation du 23 avril 2024) ? La réponse, nous la connaissons, mais il est toujours bon de la rappeler : nous sommes des manifestants indésirables, soutenant des causes dérangeant le pouvoir et le maire de Béziers. Et nous n’avons pas le soutien de la FNSEA ni celui du monde de l’argent. Mais nous continuerons pour autant à nous manifester !
Une autorisation a été demandée par l’intersyndicale CGT, Solidaires, FSU, pour un rassemblement devant ce même théâtre samedi 22 novembre à 10h30 – avec les Rosies de Béziers et les Simone Veillent – afin d’honorer les victimes des violences faites aux femmes dans le monde. L’autorisation n’a toujours pas été accordée (ni refusée, soyons honnête) à ce jour. Une réponse négative pourrait donc signifier soit que quelques dizaines de femmes et d’hommes se mobilisant contre les violences subies par les femmes auraient pour M Ménard et le sous-préfet plus de pouvoir de nuisance que 4 ou 7000 viticulteurs, soit que le sort de ces femmes victimes, violentées et assassinées ne seraient pas pour eux un sujet digne d’indignation à porter dans la rue.



























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