Béziers (3). Exploser les plafonds de verre idéologiques

par | 7 décembre 2025 | Politique locale

Le maire de Béziers s’est fait une spécialité, celle d’exploser les plafonds de verre idéologiques. C’est même devenu une marque de fabrique, largement brevetée depuis deux mandatures.

Ménard est un idéologue, c’est rare à l’échelle municipale. Son action ressemble à celle qu’a exercée Gabriele D’Annunzio à Fiume (actuelle Rijeka) avant l’avènement du fascisme italien. On y retrouve le même gout pour le dandysme et la provocation, et une volonté de dessiner les contours d’une expérience autoritaire locale.

Ici et maintenant, on peut qualifier le projet politique du « Gabriele Ménard » local de : national, catholique, intégriste et sécuritaire.

Ce projet est rarement revendiqué, le plus souvent il ne l’est pas, c’est au nom du « bons sens » que la transgression est menée. Ce « bon sens » est souvent présenté comme naturellement partagé avec la population.

Le premier plafond de verre idéologique explosé par le maire de Béziers a été celui de l’armement de la police municipale. Il l’a fait avec beaucoup moins de sens tactique que maintenant. Un matin, les Biterrois se sont réveillés avec des affiches qui couvraient la ville. Ces affiches disaient « Désormais, la police municipale a un nouvel ami ». Ce nouvel ami était représenté sous forme d’un immense révolver.

La méthode visait à créer un électro-choc, elle l’a fait ! Nous avons été nombreux ce matin là à nous être réveillés avec l’idée confuse qu’un seuil avait été franchi. Ce seuil, c’était la rupture du fameux plafond de verre idéologique.

En dynamitant volontairement la notion de l’armement pour quoi faire, Ménard ouvrait délibérément la voie à l’armement support de la répression.

À cette époque (février 2015), l’armement de la police municipale était un débat récurrent dans la droite extrême et dans l’extrême droite, mais il n’avait pas trouvé de répercussions pratiques importantes dans les petites villes de province.

En armant sa police, le maire de Béziers a créé une sorte de garde prétorienne qui lui est totalement dévouée et qui peut légalement mener les opérations qu’il décide.

Depuis lors, les effectifs de la police municipale n’ont fait qu’augmenter. Ils augmentent bien sûr au détriment des services sociaux.

Deux ans plus tard en octobre 2017, le maire de Béziers vantait les mérites : « d’un ami qui vous veut du bien ! ». Cet ami était le nouveau révolver Beretta APX qualifié de « plus pratique, plus ergonomique ».

Cet encensement de l’arme pour l’arme digne d’un chef de gang était accompagné d’un délire de grandeur et de manipulation coutumier du personnage : « en cas d’attaque terroriste, nos policiers municipaux seront, comme à Paris, Nice ou Barcelone, les premiers sur le terrain. »

Comme si les terroristes avaient pour habitude d’annoncer là où ils vont frapper. L’attentat de Nice l’a prouvé.

Dans la foulée de l’armement de la police municipale, Ménard a tenté de créer une milice de volontaires. Officieusement, de « volontaires ayant servi la patrie », elle avait un goût trop sulfureux et trop fasciste, elle venait trop tôt ; elle fut abandonnée.

À travers cet exemple, nous avons une des caractéristiques du maire de Béziers : tenter dix coups même s’il n’y en a qu’un qui est gagnant.

Cette stratégie transforme la ville en laboratoire permanent et ses habitants en souris de laboratoire.

Il faudrait un livre entier pour énumérer toutes les tentatives de briser les plafonds de verre et cet article n’y suffirait pas.

Je vous propose de nous concentrer sur les plafonds de verre réellement explosés qui sont devenus emblématiques de sa façon de fonctionner : l’installation de la crèche de Noël dans la mairie en fait partie.

Le 4 décembre 2014, quelques mois après avoir été élu, Ménard installe la première crèche de Noël dans la mairie de Béziers. Pour le préfet de région de l’époque, cette installation est contraire aux dispositions constitutionnelles et législatives garantissant le principe de laïcité. Le maire de son côté fait de la résistance contre le représentant de l’État.

Le 19 décembre 2014, le tribunal administratif rejette la demande d’enlèvement de la crèche de Béziers.

Le 16 juillet 2015, le tribunal administratif rejette le recours demandant l’annulation de la décision d’installer une crèche dans la mairie de Béziers.

Le 9 novembre 2016, le Conseil d’État autorise sous conditions les crèches de Noël dans les bâtiments publics.

Le 3 avril 2017, la crèche de Noël est interdite en appel par la justice administrative.

Le 9 novembre 2017, le Conseil d’État retoque définitivement la crèche installée depuis 2014.

Depuis lors, ce jugement vaut toujours, mais il n’est pas appliqué par les différents préfets qui se sont succédé dans l’Hérault.

On peut dire que l’exemple de la crèche est l’exemple parfait d’un plafond de verre brisé réussi, car il maintient une sorte de feuilleton et génère une mobilisation partisane. Mobilisation, qui n’existe pas à l’état initial quand le chef prend seul la décision de briser un plafond.

Ménard est arrivé à ce qu’il voulait, il l’a signifié en disant : « y a maintenant deux France », se félicitant de fait qu’elles étaient devenues irréconciliables.

Ce goût de la fracture pour la fracture, on le retrouve dans la décision de refuser d’officier un mariage en juillet 2023 comme la loi l’exigeait au motif que le marié était sous OQTF (obligation de quitter le territoire français).

Ménard risque en théorie jusqu’à 5 ans de prison, une amende de 75 000 euros et une peine d’inégalité. (Cette affaire n’est pas encore jugée.)

Il enfonce un dernier clou populiste en déclarant à l’issue de son procès : « Ce n’est pas moi qui suis en faute, c’est celui qui a eu l’obligation de quitter le territoire ».

Tous ces exemples montrent une évidence, il y a une volonté délibérée du maire de Béziers d’exploser les plafonds de verre.

Il le fait avec constance depuis plus de 10 ans.

Il le fait avec la volonté de déplacer une limite pour installer un nouveau projet politique, le sien, celui de l’extrême droite. Il rejoint en cela le rôle qu’a joué D’Annunzio en Italie avant l’avènement du fascisme.

Cette série d’articles a pour but de donner à lire un état des lieux de la ville de Béziers à quelques mois des élections municipales de mars 2026.

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lundi 8 décembre 2025, 8:06

Didier Ribo

Description de l'auteur de l'article - co-fondateur du journal majoritaire de Béziers