Une équipe d’amoureux de la forêt du Haut Languedoc, inquiète des projets industriels qui la menacent, a lancé une revue pour parler de cette richesse en danger. Baptisée Frondaison, avec le sous-titre « Il n’y a pas de fronde sans raison », elle se veut ouverte à tous ceux qui voudront apporter leurs textes qu’ils soient techniques, politiques ou poétiques.
Avec leur accord nous publierons, au fil des semaines, certains d’entre eux.
Forêt vivante, Nature accueillante.
L’Occitanie deuxième région forestière de France
Des premiers reliefs de Lafontasse aux courbes enlacées de la vallée de L’Agout, du Sidobre minéral aux entrelacs du Gigou, les espaces forestiers y sont exubérants. D’Ouest en Est, les routes qui mènent aux monts de Lacaune et celles plus étroites qui filent en tous sens, sont autant de voies qui nous ramènent à d’autres massifs forestiers tout aussi variés et resplendissants.
Plateau d’Angles, forêt de Montagnol, hêtraie de Goût, bois de Sahuzet, Versants du Montalet et des rives du Laouzas, tour de la Raviège, village du Soulié jusqu’au lac de Vézoles, enfin les Monts du Somail et des avants monts qui reniflent déjà l’air chargé de marin, nous accueillent volontiers pour nos loisirs de pleine nature.
Ces espaces plantés d’arbres séculaires, nés tout seuls mélangés ou bien aidés par l’homme, couvrent des milliers d’hectares et forment des refuges qui abritent plantes et animaux, champignons et poissons, gibier et sauvagine, et depuis peu, le loup.
Ici, comme dans tous les grands massifs forestiers Français, on aime les bois et les activités que l’on peut y pratiquer. Du Bez à Brassac, de Vabre à Lacrouzette, Le Rialet, Viane, Lacaune, Murat, Nages, Angles, Fontrieu… les sports de pleine nature sont nombreux et les espaces forestiers nous le rendent bien par leurs diversités micro-régionales.
C’est toujours intéressant de se rendre compte combien nos jeunes développent très tôt, une appétence pour la pêche, le VTT, les randonnées, la chasse, les champignons, l’équitation, la baignade, le bivouac, dans une culture familiale ancienne respectable, qui se transmet de génération en génération.
Cet équilibre fragile, qui nous permet de nous épanouir en espace naturel pourrait être remis en cause dans les années à venir par des pratiques d’exploitations forestières outrancières et gigantesques. Fini le temps de nos bûcherons locaux respectueux des arbres, qui seuls avec leurs tracteurs agricoles et leurs tronçonneuses abattaient et débardaient en un mois, ce qu’aujourd’hui les têtes abatteuses font sur trois ou quatre jours. Ce sont des milliers de mètres cubes de grumes foutues par terre en un temps record, pour servir certains industriels du bois peu vertueux. Le projet de méga-scierie le Bez/Brassac soutenu et facilité par les maires des communes respectives et les élus de la communauté des communes Sidobre vals et plateaux, va marquer l’histoire de nos territoires et des forêts pour des années.
Que vous soyez randonneurs, champignonneurs, vététistes, chasseurs, cavaliers, dirigeants de clubs et d’associations d’activités de plein-air ou simplement contemplatifs des grands espaces, vous devez comprendre ce qui se trame pour l’avenir de la biodiversité forestière, et, peut-être, vous engager et interpeller nos décideurs pour les mettre face à leur responsabilité et leur incohérence.
Comment peut-on continuer à vendre le Tarn et le Haut-Languedoc aux touristes français et étrangers si nos pôles touristiques majeurs se voient mutilés ? Que voulons-nous pour notre montagne et ses populations ancrées, quasi inféodées à cet écosystème géant ?
Face à ces constats et ces analyses territoriales, il ne faut pas croire que la forêt serait immuable et se remettrait de tout. Les bouleversements climatiques, les stress hydriques, les tempêtes impétueuses, les incendies, les coupes forestières sauvages, la pollution des sols, sont autant d’éléments perturbateurs avec lesquels il sera nécessaire de composer. Les élus le savent bien, mais ne veulent pas toujours l’entendre.
Pourtant celles et ceux qui gèrent nos forêts privées, communales et domaniales, dans des organismes privés ou chapeautés par l’état nous invitent à réfléchir sur la mauvaise santé de certaines parcelles surexploitées, la mortalité des jeunes plants sur de l’enrésinement forcé, les taux d’accroissement annuels en bois bien moindres, et les volumes de bois coupés toutes essences confondues toujours plus importants. Le marché s’élargissant, la demande s’intensifie au détriment des petits scieurs fragilisés par les grands industriels de la filière.
Mais, en dépit d’un soutien institutionnel engagé, nous avons depuis quelques années des associations, des groupements forestiers alternatifs, des paysans, des passionnés hommes et femmes dans nos villages et nos hameaux qui réfléchissent à une sylviculture diversifiée et adaptée à nos climats, nos sols, et notre topographie.
Avec eux vous pouvez œuvrer, si vous aussi vous êtes familier de la nature, titre d’un petit bouquin de 1977 de Gilbert Anscieau écrit, pour toutes celles et ceux, qui, en ces temps-là, pratiquaient en famille, la balade forestière revigorante.
André Amalvy
Contact : frondaison81@proton.me