Le 12 juin 1929, voilà exactement 94 ans, Anne Franck voit le jour à Francfort-sur-le-main d’Otto Frank et son épouse Edith Holländer. Elle a une sœur, de trois ans son aînée, Margot. Elle représente à elle seule la jeunesse qui a souffert et péri dans les camps d'extermination nazis.

Au-delà des chiffres terrifiants des victimes du nazisme, elle confère une humanité certaine à ceux que le Troisième Reich a tenté de déshumaniser.

Dès les débuts du régime nazi, Otto Franck, son père, sent la menace qui pèse sur le peuple juif et décide d’emmener sa famille s’installer aux Pays-Bas. C'est à Amsterdam que les parents et leurs deux filles posent leurs valises. Otto y débute un commerce en pectine, un extrait végétal destiné à épaissir les confitures.

Mais en 1941, les Allemands occupent les Pays-Bas et la politique antisémite du Troisième Reich s’intensifie. Anne doit quitter son école publique pour intégrer une école juive.

Voyant les déportations des Juifs se multiplier, il faut trouver une solution pour ne pas être envoyé vers ce qu’ils pensent être un camp de travail forcé.  

Le 9 juillet 1942, la famille Frank s’installe alors dans les locaux situés à l’arrière des bureaux de la société de produits alimentaires du père, Otto Frank. Ils ne sont pas seuls. Quatre voisins, vont leur tenir compagnie durant leur clandestinité dans ce qu'ils vont surnommer « l’Annexe ».

Les huit clandestins vivent calfeutrés. Il ne faut faire aucun bruit. Personne ne doit les voir ni les entendre, c’est dire s’ils se sentent comme des êtres illégitimes.

Des amis non-Juifs, qu’ils surnomment leurs « protecteurs » les aident, notamment en les ravitaillant car, même s’il est difficile de vivre, il faut survivre. Mais le temps est long.

Pendant ces deux années, Anne écrit dans le journal que son père lui a offert le 12 juin 1942, pour son treizième anniversaire. C’est un moyen quasiment vital pour elle de lutter contre l’ennui. Au-delà de s’épancher sur ses sentiments et ses pensées, elle écrit quelques nouvelles, entame un roman et note des extraits de ses lectures favorites.

Âgée d’à peine treize ans, il est troublant de remarquer qu’elle est consciente de ce qu’il arrive aux Juifs. Elle l’évoque avec une certaine maturité. En effet, elle écrit dans son journal à la date du vendredi 9 octobre 1942 : « Nous n'ignorons pas que ces pauvres gens [les Juifs capturés par les nazis] seront massacrés. La radio anglaise parle de chambre à gaz. Peut-être est-ce encore le meilleur moyen de mourir rapidement. J'en suis malade... »

Un jour, elle entend un discours du ministre de l’Éducation du gouvernement néerlandais, sur Radio Orange, la radio clandestine des Pays-Bas. Il invite la population à conserver les journaux intimes et tout autre document relatif aux souffrances du peuple pendant la guerre. Anne retravaille donc ses différents journaux dans l’espoir d’en faire plus tard un roman.

Ses espoirs sont de courte durée. Le 4 août 1944, moins d’un an avant le suicide de Hitler, ils reçoivent la pire des visites, celle de la Gestapo.

Ce serait peut-être des voisins hollandais qui les auraient dénoncés. Pire encore, des voisins juifs ! En effet, selon un ouvrage publié le 17 janvier 2022, l’adresse de l’annexe secrète aurait été révélée par le notaire Arnold van den Bergh, membre du Conseil juif d’Amsterdam. Il a pu transmettre une liste d’adresses de cachettes aux SS en échange de la protection de sa propre famille.

Miep Gies, l’une des protectrices de la famille Frank entre 1942 et 1944, parvient à sauver le journal pendant l’opération policière. Elle sait l’importance qu’il représente pour Anne. Lors d’une visite rendue à la famille dans l’Annexe, elle l’avait surprise en pleine rédaction.

Toute la famille est alors envoyée à Westerbork, un camp de transit au Pays-Bas, avant d’être déportée par le dernier convoi vers Auschwitz le 3 septembre 1944. Le voyage s’effectue dans des conditions effroyables, entassés dans un wagon à bestiaux. Pour les mille voyageurs, un seul petit tonneau fait office de toilettes.

À l’arrivée, la famille est séparée. Otto Franck est envoyé dans un camp d’hommes et Anne est internée, avec sa mère et sa sœur, dans un camp de femmes. Après avoir vécu ensemble dans leur petit refuge pendant deux ans, ils se quittent brutalement et ne se reverront jamais.

Anne et sa sœur Margot sont transférées à Bergen-Belsen en octobre, où elles découvrent la quasi absence de nourriture, la fatigue insoutenable et le froid insurmontable. À peine cinq mois plus tard, et seulement quelques semaines avant la libération du camp, elles meurent victimes d’une épidémie de typhus.

La mère, restée à Auschwitz, meurt au début du mois de janvier 1945, très peu de temps avant l’évacuation du camp par les Allemands, le 18 janvier de la même année.

Seul rescapé de la famille Frank, Otto est découvert par les troupes soviétiques qui libèrent le camp le 27 janvier 1945. Il retourne à Amsterdam. Il sait que son épouse n’a pas survécu mais doit attendre un long moment dans la tourmente avant d’apprendre la mort de ses deux filles.

Après la guerre, Miep Gies lui remet le journal de sa fille, dont elle n’a jamais lu une ligne. Elle voulait le rendre à Anne en mains propres mais, ayant appris sa mort, décide de le donner naturellement à son père. Ce dernier prend la décision de le publier en 1947. Trois ans plus tard, il est traduit en français et le monde entier va vite se prendre de passion pour l’histoire d’Anne Frank.

Anne Frank est l’exemple même de la petite Histoire qui se mêle à la Grande. Car ce n’est pas seulement pour connaître son parcours que le monde s’est intéressé à son journal mais aussi pour appréhender cette tragédie dans sa globalité humaine.

Son journal est aussi l’un des principaux moyens utilisés pour raconter l’une des plus sombres périodes de notre Histoire à la jeune génération, qui peut davantage se retrouver et s’identifier dans le discours d’une adolescente.

Elle nous fait prendre conscience que, derrière les chiffres, il y a des hommes, des femmes et des enfants, qui ont eu une vie avant de se retrouver dans un camp et, pour beaucoup, auraient dû en avoir une après. Pour certains elle incarne une amie, pour d’autres une sœur, une fille ou une petite-fille. Elle incarne l’insouciance de la jeunesse, exacerbée par l’atrocité des événements qu’elle a subis.

Aujourd’hui, son journal, traduit dans plus de soixante-dix langues, est classé au patrimoine mondial de l’UNESCO. Le lieu où elle et sa famille se cachèrent, à Amsterdam, est devenu un musée en 1960. L’ancienne Annexe est désormais connue dans le monde entier sous le nom de Maison d’Anne Frank.

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Version audio avec illustration musicale sur Radio Pays d'Hérault , à écouter ICI

 

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