Un Vichy ? . . . Non merci ! Article 8 : la collaboration par la délation

par | 21 mars 2022 | Enquête

Il existait une base sociale au régime de Vichy. Les historiens les appellent les « maréchalistes ». C’était des admirateurs inconditionnels du père de la nation, du « vainqueur de Verdun ».

Ce courant populiste est renforcé par une version plus politique les « pétainistes » qui rejettent le régime républicain. Les deux versions de l’idolâtrie pétainiste vont donner naissance à l’un des épisodes les plus sombres de l’occupation : la collaboration par la dénonciation et la délation.

Les autorités aussi bien vichyssoises qu’allemandes ont reçu des centaines de milliers de lettres de dénonciations durant toute l’occupation. Plusieurs millions si l’on comptabilise les dénonciations orales et téléphoniques. Cette lame de fond impliquait toutes les classes sociales, hommes et femmes confondues.

Les dénonciations qui concernaient : la possession d’armes, le soutien aux parachutés, la traque des juifs, des militants politiques et syndicaux, des résistants et des réfractaires au STO (Service du Travail Obligatoire), étaient en général adressées à la feldgendarmerie ou à la kommandantur.

Les délations étaient encouragées par l’occupant nazi qui offrait des primes en cas de capture. Un équipage anglais valait 10 000 francs, la capture de « terroristes » et de « criminels » 100 000 francs.

Pour des questions financières et politiques, l’occupant nazi demandait que les frais de ces « récompenses » soient à la charge de l’état français.

Vichy ne se fera pas prier pour satisfaire les désidératas de l’occupant. Confronté à une vague de dénonciations calomnieuses qui « lui faisait perdre du temps », l’occupant obligea Vichy à promulguer une loi qui limitait l’ardeur des délateurs.

Les dénonciations adressées exclusivement au régime de Vichy concernaient majoritairement le marché noir et les problèmes de ravitaillement. Mais elles portaient aussi sur tous les aspects de la vie quotidienne : jalousie, voisinage, héritage.

Cette délation était bien sûr réprouvée en silence par une grande partie de la population. En silence, car critiquer cette politique de dénonciation revenait à s’exposer aux autorités.

Le régime de Vichy a poussé à la division, à la stigmatisation des « mauvais français », à la dénonciation. Il fut aidé par la presse de caniveau. Les titres « Au Pilori » ou « Gringoire » s’étaient fait une spécialité dans les dénonciations haineuses.

L’historien Laurent Joly a mis en évidence que certaines lettres, écrites anonymement, reprenaient mot pour mot les termes employés par cette presse. Par exemple, cette formule utilisée rituellement par « Au Pilori » : « et bien sûr, ce monsieur ne porte pas l’étoile jaune ».

Au moment où des candidats à l’élection présidentielle évoquent l’anti-France et les complots islamogauchistes pour diviser la population, souhaitons que le rappel de cette collaboration par la dénonciation et la délation fasse : piqure de rappel . . .

Cet article est issu de notes de lectures du livre de Laurent Joly « La délation dans la France des années noires » édité chez Perrin en 2012.

Partager sur

En Bref

< Retour à l'accueil

L'agenda Culturel

L'agenda Militant

Lettre d'informations En Vie à Béziers

Pour recevoir notre lettre hebdomadaire

[sibwp_form id=1]

La Revue de presse

Dessins et photos d'actualités

Le mot du maire de Béziers

En vie à Béziers Adhésion et/ou dons !

Le coin des lecteurs

COLLOQUE ASSOCIATION HENRI GUILLEMIN 8 novembre 2025

Voici un colloque avec des participations qui vont être passionnantes ! « Gens de biens / Gens de rien » – Silence aux pauvres Réalités contemporaines du capitalisme ultra libéral 8 novembre 2025ECOLE NORMALE SUPÉRIEURE – salle Dussane45, rue d’Ulm 75005 Paris Le...

LA MÉMOIRE DE THOMAS SANKARA

Le 15 octobre 1987 était assassiné le capitaine Thomas Sankara, élu président du Burkina Fasso quatre ans plus tôt. Un militaire, comme Chavez, lui aussi portant des idées plutôt de "gauche" disons, collectivistes, ce qui est cohérent si on y pense vraiment. Comme...

GUERRE ET PAIX

Pause dans le génocide, libération des otages. Les tyrans pérorent. Les discours de Trump et Netanyahou à la Knesset furent une tragédie qui aurait été comique (façon Brecht et Ionesco) s’il s’agissait d’une pièce et qu’elle n’impliquait pas autant de victimes....

Collectif de lutte contre l’extrême droite, Sète/Bassin de Thau

Préparation du colloque du 6 décembre Tous les intervenants sont d’accord pour venir : Nadia Belaoui de l’ODED (Observatoire départemental contre l’extrême droite), Régis Catinaud (vote sur Sète). Christèle Lagier sur une analyse des votes du RN et des raisons de...

Au bout du fil de la presse libre

Défendons la presse libre

 A lire

L’association a bénéficié en 2018 et 2019 du fonds de soutien aux médias d’information sociale de proximité / Ministère de la culture

Nombre de visites

Nombre de visites

1036878
Total Users : 1036878

lundi 27 octobre 2025, 12:41

Didier Ribo

Description de l'auteur de l'article - co-fondateur du journal majoritaire de Béziers