Une autre histoire – 6 février 1934, manifestation antiparlementaire à Paris

par | 3 février 2023 | Extrême droite

Le 6 février 1934, voilà exactement 89 ans, une manifestation anti parlementaire se déroule à Paris. Édouard Daladier a été pressenti le 30 janvier par le président de la République Albert Lebrun pour présider le Conseil des ministres.

Ce changement de gouvernement fait suite à la découverte, trois semaines plus tôt, du cadavre d’un escroc, Alexandre Stavisky. (c’était le sujet de la chronique  « Une autre histoire » du 9 janvier dernier – version audio ICI, version texte ICI )

L’opinion publique soupçonne des ministres et des députés d’avoir trempé dans ses combines. Quatre députés radicaux et francs-maçons sont, il est vrai, compromis dans le scandale. La méfiance de l’opinion  est exacerbée par l’annonce de la mutation par Édouard Daladier du préfet de police Jean Chiappe, suspect de mansuétude à l’égard des « ligues ».

Ces ligues – mouvements politiques de masse – rassemblent les mécontents de tout poil. Elles se sont multipliées en marge des partis parlementaires, à la faveur de la crise économique.

Elles bénéficient du soutien de trois hebdomadaires influents de droite ou d’extrême-droite : Gringoire (600 000 lecteurs), Candide (Pierre Gaxotte, 300 000 lecteurs), Je suis partout (Robert Brasillach, 100 000 lecteurs).

 

En signe de protestation, les ligues appellent à manifester le jour même de l’investiture de Daladier, à Paris, place de la Concorde, en face de la Chambre des députés ce 6 février 1934.

Parmi les organisateurs de la manifestation figure l’association d’anciens combattants Les Croix-de-Feu présidée par le lieutenant-colonel comte François de La Roque (49 ans). Leur nom vient de l’appellation donnée aux combattants décorés pour une action d’éclat en première ligne pendant la Grande Guerre.

De La Roque, est adulé par les 300 000 adhérents de son association, anciens combattants et fils ou parents d’anciens combattants.Les Croix-de-Feu constituent le groupe le plus nombreux de la manifestation.

Sont aussi présents la ligue monarchiste Action française, la ligue des Jeunesses patriotes fondée en 1924 par Pierre Taittinger, conseiller municipal de Paris ainsi que le groupe Solidarité française du parfumeur François Coty, émule de Mussolini, et même une Fédération des contribuables !

Au total guère plus de 30 000 manifestants dont une forte majorité d’anciens combattants. Tous se mobilisent sur le thème : « À bas les voleurs ! » et réclament davantage de civisme, d’honnêteté…

À l’appel du lieutenant-colonel de La Roque, les Croix-de-Feu se dispersent rapidement dès que se produisent les premières échauffourées avec la garde mobile. Bien qu’arrivés en fin d’après-midi aux portes du Palais-Bourbon, La Rocque et ses anciens combattants se refusent à occuper celui-ci. Leur dispersion rend vaine toute possibilité de renverser le régime par la force.

 

Mais de l’autre côté de la Seine, autour de la place de la Concorde, la manifestation dégénère. Des milliers de militants tentent de marcher sur le Palais-Bourbon. La Garde mobile tire. Les affrontements se prolongent tard dans la nuit. Seize manifestants et un policier sont tués. On compte un millier de blessés.

La gauche parlementaire dénonce dans la manifestation du 6 février une tentative de coup d’État fasciste. Elle appelle au rassemblement des forces progressistes. Trois jours plus tard, une contre-manifestation à laquelle participent les socialistes et les communistes dégénère à son tour et fait neuf morts.

Le président du Conseil Édouard Daladier, qui a été porté au pouvoir par la majorité socialiste et radicale élue en 1932, cède saa place dès le 7 février à l’ancien président de la République Gaston Doumergue (71 ans), beaucoup plus consensuel bien que radical-socialiste et franc-maçon. Dans le nouveau gouvernement entrent Édouard Herriot et les chefs de la droite battus deux ans plus tôt.

Les militants socialistes et communistes croient voir dans les émeutes du 6 février et le changement de gouvernement une tentative de coup d’État d’extrême-droite. Ces militants poussent leurs chefs à s’unir pour faire front à la droite et gagner les prochaines élections législatives.

Staline s’inquiète de l’accession au pouvoir de Hitler en Allemagne l’année précédente. Il craint une contagion des régimes anticommunistes en Europe. Pour la prévenir, il demande aux chefs des partis communistes réunis au sein de l’Internationale communiste, le Komintern, de faire alliance avec les autres partis de gauche, y compris les partis socio-démocrates.

C’est ainsi que se constituent en France et en Espagne des alliances électorales appelées Fronts Populaires. Elles vont gagner les élections législatives de 1936.

Le 10 janvier 1936, deux ans après les tragiques dérapages du 6 février 1934, sous le gouvernement de Pierre Laval, les députés votent une loi autorisant la dissolution des ligues hostiles à la République.

Le comte de La Rocque dissout son mouvement et crée un nouveau parti, le Parti Social Français (PSF), d’inspiration chrétienne-démocrate. Il va progresser jusqu’à rassembler un million de militants et devenir le premier parti de France.

Par ailleurs, à l’extrême-droite, les déceptions des royalistes de l’Action Française et des anciens ligueurs suscitent le développement d’une association secrète antirépublicaine, connue sous le nom de Cagoule.

La Cagoule est un mystérieux mouvement politique né après les émeutes du 6 février 1934. De son vrai nom CSAR (Comité secret d’action révolutionnaire), cette association secrète d’anciens royalistes et de ligueurs d’extrême-droite a été ainsi surnommée par la presse. Elle se montre très active à partir de 1935 et de l’ascension du Front Populaire, sous la direction d’ Eugène Deloncle. La Cagoule se propose de renverser la République, qualifiée avec mépris de « gueuse », en fomentant une révolution par le haut.

Bénéficiant de l’aide financière de plusieurs industriels dont Eugène Schueller, fondateur de L’Oréal, la Cagoule projettera d’installer à la tête de l’État le maréchal Philippe Pétain… Il est vrai que le héros de Verdun est dans les années 1930 le Français le plus populaire.

Finalement, il faudra attendre juillet 1940, pour que Pétain, à  la tête des partisans de l’armistice,  se proclame chef de l’État français et s’arroge tous les pouvoirs.

… mais c’est une autre histoire !

Version audio avec illustration musicale sur Radio Pays d’Hérault, à écouter ICI

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