Le 18 septembre 1981, voilà 42 ans, la peine de mort est abolie en France.  L'Assemblée nationale vote ce jour-là la loi d'abolition de la peine de mort présentée par le garde des Sceaux, Robert Badinter. La France rejoint  ainsi le camp des pays abolitionnistes.  369 députés votent en sa faveur et 113 s'y opposent.  C'est la  mesure  la plus symbolique qui restera des deux septennats du président François Mitterrand.....

Toutes les sociétés ont pratiqué la peine de mort, avec des variantes innombrables : empoisonnement à la ciguë (Athènes), décapitation ou lapidation (Hébreux), décapitation, précipitation, pendaison, crucifiement (Rome) ou autre strangulation

La France de l'Ancien Régime n'a rien à envier à ces antiques exemples : décapitation (noblesse), pendaison, roue ou encore écartèlement (régicide). Mais la Révolution arrive et au nom de l'article 1 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen («tous les citoyens sont égaux...»), elle généralise l'emploi de la machine du bon docteur Guillotin : «Tout condamné à mort aura la tête tranchée».

Mais dès la fin du XVIIIe siècle, la peine de mort fait l'objet d'une contestation courageuse. Après la chute de l'Empire, François Guizot relance le combat en faveur de l'abolition et échoue de peu à faire voter une loi dans ce sens. Le jeune poète Victor Hugo publie en 1829 Le Dernier Jour d'un Condamné. Il interviendra à l'Assemblée en 1848

Après la vaine tentative de Guizot, le républicain Jules Simon tente une nouvelle fois en 1870 de faire passer l'abolition.

Au tournant du siècle, les présidents de la République Émile Loubet (1898-1906)et Armand Fallières (1906-1913) usent systématiquement de leur droit de grâce, en résistant avec courage à la pression de l'opinion publique. Le garde des sceaux Aristide Briand veut transformer l'essai en faisant passer une simple loi : «La peine de mort est abolie», mais l'opposition se déchaîne !

Cela dit, on compte de moins en moins d'exécutions et, en 1970, année sans exécution, le sombre rituel paraît voué à tomber en désuétude. Mais l'exécution de Buffet et de son complice Bontemps, le 28 avril 1972, anéantit les espoirs des abolitionnistes, parmi lesquels maître Badinter, avocat de Bontemps.

Le 10 mars 1976, une nouvelle condamnation envoie à l'échafaud Christian Ranucci, un jeune homme de 20 ans accusé du meurtre d'un enfant. Robert Badinter, son avocat, se voit refuser sa grâce par le président Valéry Giscard d'Estaing, dont l'esprit d'ouverture se heurte à la pression croissante de la fraction conservatrice de son camp. Du coup, le rival socialiste du président va faire de ce thème de l'abolition le marqueur de sa campagne de 1981.

Robert Badinter, devenu Ministre de la Justice de François Mitterand présente ce 18 septembre 1981 son projet de loi portant abolition de la peine de mort. L'instant est solennel. L'émotion de l'ancien avocat des derniers condamnés à mort exécutés est impressionnante. Sa détermination et son plaidoyer aussi.

 Ce18 septembre, à l'Assemblée Nationale, il faudra plusieurs heures pour arriver au vote final. Sur les 482 députés qui se prononcent, 369 votent pour l'abolition et 113 contre. Le 30 septembre, le Sénat fit de même ; le 9 octobre 1981, François Mitterrand signait la loi n° 81-908 portant abolition de la peine de mort Ce vote donnera lieu à la loi d'abolition le 9 octobre 1981. Cet événement est la conséquence d'une longue évolution. En effet, la peine de mort fut une première fois abolie en 1795 par la Convention, puis rétablie en 1810 sous l'Empire. En 1906, un projet de loi pour transformer la peine capitale en peine perpétuelle est rejeté. A partir de 1939, le public ne peut plus assister aux exécutions. Puis, à partir de 1951, la presse n'a plus le droit de les commenter. Il faut donc attendre la présidence de François Mitterrand, élu en mai 1981, pour que le dossier soit débattu à nouveau à l'Assemblée nationale.

Sous la Ve République, de 1958 à 1981, il y a eu 19 exécutions, la dernière peine de mort ayant été prononcée en 1977. Depuis 1981, près de trente demandes de rétablissement de la peine de mort ont été déposées à l'Assemblée nationale.

La peine de mort a été unanimement répudiée par les États européens et le Canada ainsi que de nombreux États latino-américains et plusieurs États d'Afrique subsaharienne et d'Océanie. La Russie ou encore l'Algérie ont instauré un moratoire sur son application...

En 2022, 142 pays ont aboli la peine de mort dans leur législation ou en pratique mais 53 pays la pratiquent encore.

L'essentiel de l'Asie et les pays les plus peuplés (Chine, Inde, Indonésie, États-Unis, Pakistan, Japon, Bangladesh etc) continuent d'appliquer la peine de mort sans guère d'état d'âme.

Aux États-Unis, la peine de mort a été introduite dans les colonies d'Amérique du nord dès 1608. On est passé d'environ 50 exécutions en 1800 à 150 en 1900. Après un pic durant la prohibition avec 200 exécutions en 1930, leur nombre a décliné jusqu'à la fin des années 60.

De plus en plus d'Américains sont sceptiques sur son effet dissuasif, observant que les États les plus actifs comme le Texas sont aussi ceux où la criminalité est la plus forte ! Un rapport américain indique d'ailleurs que 57 % des policiers eux-mêmes ne croient plus à son efficacité. Ensuite, les tests ADN révèlent que les «couloirs de la mort» hébergent de nombreux innocents condamnés à tort.

Revenons en France où l'abolition, bien que votée à une large majorité, ne rencontrait pas l'adhésion de l'opinion publique, puisque 62 % des Français se disaient favorables à la peine de mort en 1981. Aujourd'hui 37%  souhaitent encore son rétablissement. Depuis 1981, près de trente demandes de rétablissement de la peine de mort ont été déposées à l'Assemblée nationale.

Amnesty International a recensé 883 exécutions dans 20 pays en 2022, soit une hausse de 53 % par rapport à 2021.

Ce 18 septembre, c'est aussi, depuis 2020 la journée internationale de l'égalité de rémunération... mais c'est une autre histoire

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