À Béziers comme en France, le fascisme peut s’installer et prospérer sans le bruit assourdissant des bottes.
Épisode 7 (avant-dernier) : ne pas oublier
Les fascistes gardent la mémoire de ce qu’ils ont été et de ce qu’ils ont fait.
Dans des pays comme la France et l’Italie qui célèbrent encore la victoire contre le fascisme, il est difficile de revendiquer ouvertement une parenté avec Pétain ou Mussolini.
Pour les fascistes, l’Histoire racontée officiellement n’est pas la leur : c’est celle des vainqueurs. Dans cette histoire, les résistants sont des héros et les fascistes des traîtres à la patrie.
Pour réécrire l’Histoire, le fascisme invente un autre discours, une autre réalité.
Dans cette réalité parallèle, les chambres à gaz deviennent « un détail de l’histoire » pour Jean-Marie Le Pen et Pétain a sauvé les Juifs de France pour l’ex-députée Emmanuelle Ménard.
Pour arriver à réécrire l’Histoire, le fascisme mise sur un fait, la mémoire est périssable : si elle n’est pas entretenue et partagée, elle disparaît.
À quelques décennies d’écart, Jean Marie Le Pen a été inculpé pour ses propos, pas Emmanuelle Ménard.
Pour les fascistes la mémoire est modulable, elle peut être transformée si un chef prélève quelques souvenirs épars et en fait une généralité.
À Béziers le maire veut ainsi faire de la religion catholique le creuset d’une nouvelle histoire commune.
Cette propension est cocasse quand on sait que les croisés catholiques ont rasé la ville et massacré ses habitants (comme Charles Martel quelques siècles auparavant).
Les fascistes savent que tôt ou tard, les gardiens des souvenirs vont mourir. Les combattre trop tôt n’a aucun intérêt, il suffit d’attendre pour espérer se réapproprier le passé.
Pour se réapproprier le passé, le fascisme agit en 3 temps. Il brouille la mémoire, il la déconstruit et enfin il la réécrit.
Brouiller la mémoire représente la première étape vers sa correction. Dans cette première phase, le fascisme ne nie pas les accusations. Ce serait prématuré et soulèverait une indignation générale. Pour les fascistes il s’est passé « d’autres choses » tout aussi importantes que les faits officiels.
À Béziers, le maire met en exergue les massacres du stalinisme, mais honore la mémoire des factieux de l’Algérie française.
Les fascistes passent à la déconstruction de l’Histoire quand quelques générations séparent le présent du passé. Ils inventent alors des pseudos vertus aux régimes dictatoriaux qu’ils qualifient simplement de régimes autoritaires.
À ceux qui les traitent de « négationnistes », les fascistes répondent que les sources d’information ne sont pas fiables et sont tenus par des lobbys.
Pour les fascistes la faute peut avoir été grave, mais elle appartient au passé. Dans leur rhétorique, tout le monde commet des erreurs et ces erreurs n’engagent que ceux qui les ont commises. Ils réussissent à s’exonérer d’un système de pensée.
Arrivés à ce stade les fascistes dissocient le passé et le présent. Ils refusent d’être responsables d’une idéologie qu’ils partagent.
Pour les fascistes, la réécriture de la mémoire est la dernière étape avant le processus de reconquête.
À Béziers où il prospère depuis 12 ans le fascisme prend la forme d’un catholicisme municipal avec des messes à chaque évènement public et l’installation d’une crèche dans l’Hôtel de Ville. Ce fascisme municipal n’est bien sûr que partiel, mais il aspire à être amplifié dans une dynamique nationale.
En conclusion, le fascisme n’a pas disparu, il est toujours présent, mais sous d’autres oripeaux. Si vous voulez vous en convaincre, je vous propose un « fascistotest » la semaine prochaine pour boucler cette série.
Il vous permettra d’évaluer le degré de fascisme de vos hommes politiques et autres apprentis « caudillo », « duce », « führer ».

























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