Le 28 août 1933, voilà exactement 89 ans, Violette Nozières est arrêtée pour parricide. Son père est décédé, sa mère a survécu. Ce fait divers s'est transformé en fait de société. Il a passionné la France. L'opinion publique se divise en deux camps et s'enflamme pour l'affaire Violette Nozière.

La droite fustige en Violette, une jeunesse d'après-guerre dévoyée et fait  appel à l'ordre moral, au retour des valeurs. La gauche fait de Violette, un symbole de la lutte contre la société. Les écrivains, poètes, mais également peintres, prennent fait et cause pour Violette Nozière.

On a du mal à croire que la jeune fille arrêtée ce matin du 28 août 1933 soit une criminelle. Cela fait cinq jours que la police recherche Violette Nozière. Aux enquêteurs, elle finit par déclarer que son père abusait d'elle depuis des années et qu'elle s'était vengée de lui. Au sujet de sa mère, ses explications sont plus floues. Elle dit qu'elle n'a pas voulu la tuer, mais aussi qu'elle lui en voulait pour son refus de voir ce qui se passait et qu'elle a souhaité lui épargner la honte que susciterait la révélation des agissements de son père. Elle est toute jeune : 18 ans à peine.

Violette Nozière a échoué au premier baccalauréat, abandonné ses études et vit libre comme l'air. En réalité, elle mène une double vie. Enfant sage, ses parents, au domicile desquels elle vit, ne la pressent pas de question et lui laissent toute liberté.

Elle joue, au dehors, les vamps et recourt à ses premiers mensonges, du fait de retards et d'absences répétés. Désoeuvrée, Violette passe la majeure partie de son temps au Quartier Latin, dans les cinémas et les brasseries des grands boulevards. Elle va acquérir la réputation d'être une "petite coureuse". Elle se prostitue pour subvenir aux besoins de son amant, pour lequel elle vole une partie de la caisse familiale. Un gogo avec lequel elle espère bien partir en vacances aux Sables-d'Olonne.

La fréquentation du monde étudiant, cette classe sociale aisée, amène aussi Violette à mentir sur ses origines, son milieu.   Violette a honte de ses parents, qui sont pourtant bien indulgents avec elle. Elle s'en éloigne de plus en plus. L'atmosphère du foyer est délétère et le ressentiment de Violette envers ses proches s'accentue.

Elle décide d'entraîner sa famille dans la mort. Le 23 mars 1933, Violette achète un tube de "Soménal", un barbiturique et un somnifère, en pharmacie. Elle persuade ses parents de prendre ce médicament afin de les protéger d'une éventuelle contagion. Raté ! Le 21 août 1933, Violette renouvelle sa tentative du 23 mars mais avec une dose beaucoup plus forte de Soménal. Le soir après le dîner, Violette absorbe le contenu du sachet identifié par une croix. Son père sans méfiance, avale la totalité du poison, par contre sa mère en jette la moitié, ce qui lui sauve la vie.

Violette vole l'argent qui se trouve sur sa mère et prend la paie de son père. Elle quitte l'appartement pour y revenir le 23 août à une heure du matin. Elle ouvre le gaz, afin de faire croire que ses parents ont tenté de se suicider par ce moyen et alerte ses voisins.

Elle sera arrêté le 28 août suite à une dénonciation d’un jeune homme qui l'a reconnue.

On imagine peu aujourd'hui les tumultes soulevés par le seul nom de Violette Nozière. Son nom s'étalait en capitales à la une de toute la presse. Sa lugubre histoire, mises en couplets pathétiques inspirait les chanteurs de complainte au coin des rues .

Pour la majorité des Français, c'est le style de vie dissolu de Violette Nozière qui explique son geste. Les surréalistes, eux, Eluard, Breton, Desnos avaient sacré dans l'empoisonneuse une héroïne de l'anti famille. Une Jeanne d'Arc brandissant la bannière de la Résistance au conformisme moral. Convaincus de la réalité de l'inceste, il publient même une brochure pour la soutenir.

Sa mère refuse de croire la version de sa fille, le Tribunal aussi. Elle est condamnée à mort le 13 octobre 1934. Comme alors on n'exécute pas les femmes, sa peine est commuée en emprisonnement à vie, à peine réduite à 12 ans pour bonne conduite par le maréchal Pétain. Elle sera graciée par le Général de Gaulle en 1945 et libérée. En 1963, peu  avant sa mort, la Cour de Rouen, fait unique dans l'histoire de la justice française, s'agissant d'un condamné à mort de droit commun,  prononce sa réhabilitation.

Meurtrière cynique, amoureuse éperdue, justicière ou mythomane, qui était donc Violette Nozière ?  Et cette histoire d'inceste ? mensonge, fantasme ou réalité douloureuse ? Et ce père était-il vraiment le sien ?

Le film de Claude Chabrol, réalisé en 1978, avec Isabelle Huppert dans le rôle principal laissent ces questions ouvertes.

Décidément l'année 1933 fut riche en faits divers qui ont marqués l'histoire. C'est en  septembre que Léa et Christine Papin sont condamnées pour l’atroce assassinat de leur patronne et de sa fille commis 7 mois plus tôt au Mans

...mais c'est une autre histoire !

 

 

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